1Contexte

Si vous exploitez une entreprise avec des associés par le biais d'une société de personnes, vous allez probablement accumuler une certaine équité au fil des années. L'astuce vise donc à accéder à cette équité par le biais d'un retrait de capital afin de rembourser un emprunt personnel, par exemple votre hypothèque résidentielle, et ensuite, d'emprunter un montant équivalent à la banque afin de renflouer votre participation dans la société de personnes. Ainsi, votre emprunt bancaire, auparavant relié à votre hypothèque résidentielle, sera maintenant relié à votre participation dans la société de personnes et ainsi, vos intérêts seront déductibles.

2Règle de l'utilisation directe des fonds empruntés - Jugement Shell

Une règle établie par les tribunaux dans le jugement Shell, veut que l’utilisation directe des fonds empruntés soit le critère fondamental à la base de toute analyse de déductibilité des intérêts. Selon la cour: « [...]la raison pour laquelle un mode d’emprunt est préféré à un autre importe peu pour l’application du sous-al. 20(1)c)(i). Ce qui est déterminant, c’est l’utilisation de la somme empruntée. La raison pour laquelle l’opération d’emprunt est structurée comme elle l’est n’a pas d’importance, pas plus d’ailleurs que la raison pour laquelle l’argent est emprunté. »

3Fiscalité

Peu importe votre motivation à procéder à la mise en place d'une telle stratégie, les autorités fiscales doivent se limiter à une analyse de l'utilisation directe des fonds empruntés afin de déterminer si les intérêts sont déductibles.

De façon générale, les tribunaux ne tiennent pas compte de l'objet ultime de l'emprunt, par exemple, l'achat d'une maison. La reconnaissance par les tribunaux du critère de l’utilisation directe des fonds empruntés est à la base de l'ensemble des planifications visant à restructurer les emprunts personnels, par exemple, une hypothèque résidentielle, de façon à en rendre les intérêts déductibles du revenu.

Les autorités fiscales reconnaissent cette stratégie dans le bulletin d'interprétation IT-533.

4Exemple pratique

(Il s'agit essentiellement des faits tirés du jugement Singleton.)

M. PME est un professionnel exerçant sa profession avec des associés par le biais d’une société de personnes. Il possède une résidence (principale ou secondaire) dont le solde de dette hypothécaire est de 400 000$.

M. PME effectue un retrait de capital de la société d’un montant de 400 000$ et rembourse sa dette personnelle. Il emprunte ensuite le même montant de 400 000$ de son institution financière afin de renflouer sa participation dans la société, au grand bonheur de ses associés.

M. PME n’a ainsi plus aucune dette personnelle. Il a plutôt une dette commerciale dont les intérêts sont déductibles de son revenu. Ainsi, la dette de 400 000$ de M. PME, restructurée, à un taux de 6%, selon ce qui précède, générera pour lui une économie annuelle de 12 000$.

5Usage indirect des fonds empruntés

Compte tenu que les tribunaux ont reconnu que, dans certaines situations, l'usage indirect des fonds empruntés puisse être admissible aux fins de la déductibilité d'intérêts, l'astuce pourrait être mise en place, à titre alternatif, de la façon suivante :

L'analyse de l'usage indirect des fonds empruntés démontrera que l'emprunt a servi à combler le vide suite à la remise de capital en faveur d'un associé et, donc, les intérêts seront déductibles pour la société de personnes.

Les autorités fiscales reconnaissent cette stratégie dans le bulletin d'interprétation IT-533.